Depuis Fanjeaux, à l’extrémité du faubourg où est située la maison de saint Dominique, on découvre une plaine immense avec, au nord, la Montagne noire.
Dominique priait en ce lieu un soir de juillet 1206 lorsqu’il voit fondre un globe de feu sur le hameau de Prouilhe, un village abandonné, ravagé par les guerres féodales, avec une chapelle dédiée à Notre-Dame, antique lieu de pèlerinage. Renouvelé les jours suivants, ce signe devient pour Dominique “signe de Dieu” (d’où le nom de Seignadou donné depuis à ce promontoire) : là où est tombé le feu, là sera le lieu destiné à recevoir son œuvre.
Par acte daté de 1206, l’évêque Foulques de Toulouse « donne et concède au seigneur Dominique, d’Osma, l’église de Sainte-Marie de Prouilhe et trente-trois pas du terrain entourant ladite église ». Une habitation en terre battue est construite et Dominique y installe ses premières sœurs, pour la plupart converties du catharisme. A des femmes qui, dans l’hérésie, avaient mené une vie quasi religieuse, pénitente et austère, Dominique offre un mode de vie semblable dans la tradition catholique. Les moyens sont proches mais la fin est tout autre : témoigner de la force de la Parole de Dieu qui convertit les cœurs. Et témoigner au plein milieu de l’hérésie, non à l’abri de quelque abbaye retirée ! Le 27 décembre, il leur donne un habit religieux et les soumet à la clôture. La Sainte Prédication de Prouilhe était née, non seulement base de mission des prédicateurs mais aussi lieu de prière ardente pour que la parole de ceux-ci soit accueillie. A la fois “fruit” de la prédication et tout entière à son service, l’institution était déjà une forme de prédication.
C’est aussi à Prouilhe que Dominique aime grouper ses premiers disciples pour les enseigner. C’est là qu’il les réunit pour y délibérer sur le choix d’une règle ; là qu’il les convoque une dernière fois, le 15 août 1217 et reçoit leur profession, avant de les disperser dans le monde.
Prouilhe traverse les siècles dans la ferveur, et demeure « gage de bénédiction » pour le pays de Languedoc. Les Sœurs sont toujours confiées aux soins des Dominicains leurs Frères.
À la suite du Concordat de 1516 entre François Ier et Léon X qui concède au roi de France le privilège de nommer aux évêchés, abbayes et prieurés conventuels, Prouilhe voit s’ouvrir une ère de difficultés et de conflits dont la communauté eut à souffrir. Privé de son autonomie, le monastère devient Prieuré Royal, à savoir un objet de convoitise pour les ambitions et les intérêts humains.
En mars 1715, un violent incendie éclate qui dévore la plus grande partie des bâtiments. Ce désastre aggrave une situation financière devenue inquiétante. Il faut emprunter pour continuer les constructions ou en prévoir de nouvelles. Le Conseil du roi impose aux sœurs le plan de François Mansard de Sagone, architecte royal, qui vient à Prouilhe en janvier 1747. Les travaux traînent en longueur jusqu’en 1757 où le Fr. Raymond Vergès, dominicain et architecte de talent, préside à l’achèvement de l’entreprise.
Aux émissaires de la Révolution qui les interrogent, les sœurs déclarent vouloir persévérer dans leurs vœux. Elles sont expulsées en 1792. Le monastère est vendu comme bien national. Il est rapidement pillé et devient une vaste carrière de pierres.
En 1885 débute, sous l’impulsion de Mgr Billard, évêque de Carcassonne, la construction d’une Basilique dédiée à Notre-Dame du Rosaire Les travaux sont interrompus par la mort de l’évêque (1901) et les lois de séparation de l’Eglise et de l’Etat puis par la première guerre mondiale. C’est seulement en 1926 que la grande nef reçoit une couverture « provisoire »… encore en place aujourd’hui mais nécessitant à présent une réfection urgente ! En 1968, sur les plans de l’architecte Pierre VAGO, une réorganisation de l’espace intérieur permet de chauffer une partie de la basilique. En 1987 : réfection des grandes portes d’entrée et du narthex. A l’approche du VIII° centenaire du monastère, le désir d’achever la Basilique est à nouveau évoqué et plusieurs projets sont étudiés. Celui de l’architecte dominicain espagnol, le Père Francisco Coello, consistant à retrouver la conception et la mission de cet ensemble architectural romano-byzantin, est finalement retenu. Les travaux commencent en février 2008, interrompus six mois plus tard pour cause de litiges importants avec l’entreprise. Une transaction suite à négociation en septembre 2014 permet d’envisager une nouvelle étape. Dans la perspective des 800 ans de l’Ordre dominicain, la Basilique est nettoyée et complètement ouverte pour la célébration jubilaire du 25 mai 2015. Les mois d’été, la Communauté peut célébrer dans le chevet de la Basilique sommairement réaménagé, en attendant que les fonds soient suffisants pour reprendre les travaux. 2017 : l’espace de la nef centrale doit être sécurisé du fait de la dégradation de la toiture. 2019 : la communauté réfléchit à la possibilité de la réfection de la toiture pour retrouver l’usage de l’ensemble du bâtiment et faciliter l’accès aux lieux de prière et de célébration.
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